LaRevue - Arts, cultures et sociétés


LaRevue, n°78


Éditorial

« Et que dire de l’assujettissement du mot au sens ? Le mot n’est pas une chose. Le sens qu’il revêt n’est en aucun cas la traduction de ce qu’il est. On n’a jamais vu en vérité que donner un nom imaginaire à une chose soit la baptiser. Le plus commode, et scientifiquement le plus juste, est de considérer le mot comme une image autrement dit comme une image verbale. On élimine ainsi les problèmes de forme et de fond : la phonétique sera la forme, tout le reste le fond. On élimine également ainsi la question de savoir à qui appartient la priorité, au mot ou à sa nature sonore. La représentation verbale est un ensemble complexe de phénomènes, une cohésion, un “système”. Le sens, c’est la bougie qui brûle à l’intérieur d’un lampion, tandis que la représentation sonore, ce qu’on appelle le phonème, se glisse à l’intérieur du sens comme la bougie à l’intérieur du lampion. » (Ossip Mandelstam, De la poésie)


TK-21 LaRevue
vous invite le 14 février à fêter la Saint Valentin et le nouvel an chinois à la Galerie Art-Z (27, rue Keller) à partir de 19 heures. Nous nous retrouverons là désormais le deuxième mercredi du mois jusqu’en juin pour des rencontres, des conférences, des ateliers et le plaisir d’être ensemble.

TK-21 LaRevue
vous présente ses meilleurs vœux pour cette nouvelle année. De développer, se transformer, poursuivre les questionnements sur le statut et la fonction des images aujourd’hui, être un lieu ouvert à la création plastique et littéraire, TK-21 LaRevue entend poursuivre avec énergie son chemin dans la forêt inextricable des propositions qui existent sur la toile.

Rien n’est possible sans votre soutien, et votre meilleur soutien est de nous lire et de partager avec vos contacts les propositions que nous vous faisons, non sans oublier de nous soutenir aussi financièrement. La gratuité est une valeur forte dans l’environnement culturel et économique qui est censé être le nôtre. Faire face à la déferlante du mépris implique de prendre conscience des exigences qu’impose un tel positionnement. Lisez, et partagez ! C’est ce qui fait de vous les acteurs de l’évolution et du monde qui vous entoure et de cette revue, support de visions et de propositions d’intensité poétique à variations continues.

Une certaine régularité s’est imposée au fil des années qui s’est toujours accompagnée de la présence de personnalités nouvelles, inconnues, artistes, écrivains, gens de théâtre, gens d’images. Le sommaire de ce N°78 qui ouvre l’année 2018 ne manque ni de présences connues, ni de découvertes.

Jean-Louis Poitevin entame avec cetteLogiconochronie – XXIV une réflexion en deux temps sur l’invention en art, analyse qui se déploie entre des réflexions portées par Paul Klee et Gilbert Simondon.

Président de l’AICA Taïwan et Professeur au Département art et design de la National Taipei University of Education, LIN Chiming est aussi un romaniste émérite et un traducteur de grands auteurs français. TK-21 LaRevue est honorée d’accueillir ce texte écrit en français, d’autant plus qu’il prolonge avec une acuité certaine, les réflexions menées ici sur la relation entre photographie et peinture paysagère dans la tradition chinoise (N° 39). On va ici tenter de comprendre ce qui lie ces deux domaines en particulier à travers une réflexion sur l’œuvre de YAO Jui-Chung (né en 1969 à Taipei).

Fondateur du groupe Novembre et compagnon de route de TK-21 LaRevue, le plus français des artistes coréens vivant en France où il réside depuis plus de trente ans, Chong Jae Kyoo va avoir une importante exposition personnelle à la galerie Gana à Séoul. À cette occasion, TK-21 lui rend un hommage à travers un long entretien vidéo et un texte de Jean-Louis Poitevin qui accompagnait son travail lors de la grande exposition du Groupe Novembre à Séoul au Hanmi Museum en 2009.

Dans la deuxième partie de l’entretien qu’elle a accordé à TK-21 LaRevue, Valérie Knochel Abécassis, Directrice et fondatrice du Centre d’art de Versailles, La Maréchalerie,analyse ce qui différencie un artiste d’un architecte. Y a-t-il une si profonde différence entre les positions et les actes des uns et des autres ? Par une argumentation qui tend à distinguer clairement ces deux activités créatrices, elle insiste aussi sur les possibilités innovantes que les pratiques artistiques déploient dans la mise en place de propos visant à une poétique extrême.

Pour Ibn El Farouk les matériaux de ses travaux ne sont pas la belle matière des artistes, mais cette assiette cassée ou ce citron dont il traque les formes et les contenus cachés. Nouveau venu dans TK-21 LaRevue, le travail d’Ibn El Farouk est présenté par son ami philosophe Patrick Gatignol.

Nouveau venu également dans la revue, l’artiste Pierre Mabille présente ici à la fois son travail de peintre et des extraits de C’est cadeau un livre de poèmes et de dessins aux Éditions Unes. Le livre sort à l’occasion de son exposition qui se tient actuellement à la Galerie Fournier.

Pier Paolo Patti dont nous avons déjà montré des œuvres dans les numéros 32, 59 et 65, est présent avec un texte de Stefano Taccone qui évoque son exposition actuelle Forgiveness and Inconsciousness qui se tient Galleria Primo Piano à Naples. Il y évoque « The perpetual motion, hypnotic oscillation between real and unreal. Constant and insidious conflict between what it is and what we would like it to be. Between what it was and what it should have been. » À voir parce que nous tous sommes des somnambules !

Chroniqueur fidèle, Jae Wook Lee, artiste coréen vivant aux États-Unis, revient avec une analyse de cette situation nouvelle dans laquelle sont prises les pratiques artistiques et comme on le constate pas seulement en Europe. « Also, artistic research and knowledge production have become central practices in contemporary art institutions in the recent past years. As “Social Practice” or “Socially-engaged Art” has triumphed in contemporary art discourses, museums have accordingly begun to acquire and present these practices. »

Laëtitia Bischoff nous emmène cette fois à la rencontre de Mamadou Gomis, photographe, reporter puis artiste. Sénégalais, il a fait de l’Europe son terrain d’aventure. Elle analyse le « net » en photographie avec une précision chirurgicale et poétique.

Les vidéos qui paraissent dans TK-21 LaRevue font comme toujours parler d’elles. Chan Kay Yuen revient avec une vidéo dont l’humour et l’ironie ne peuvent que nous mettre en jambes à défaut de nous mettre « en marche » ! Il présentera son travail le 14 février à la gallerie Art-Z pour les nouveaux ateliers TK-21.

Stéphane Mortier nous livre quatre nouveaux Quotidiens d’atelier. Nous épions cette fois les gestes de Christophe Baltimore, Olivier Kervern, Sébastien Le Guen et Roberto Cont.

Des artistes suivis par TK-21 LaRevue ou des acteurs de cette même revue sont à l’affiche en ce moment. Nous leur faisons un signe bref d’encouragement pour leurs expositions :

Elizabeth Prouvost expose au service de soins palliatifs du CH de Troyes à la Résidence Comte Henri. Comme toujours elle cherche à faire partager sa conception expressive de la photographie par des corps sublimés. « Pour moi, l’expérience de la photographie n’est rien si elle ne recule pas les limites de l’inconnu, de l’insaisissable. C’est une expérience qui compte plus que la connaissance ».

Martial Verdier et Olivier Perrot exposent du 5 au 18 février 2018 (Vernissage le mardi 6 février, à partir de 18 heures) à la Galerie La Ville A des Arts. Ces deux membres du Groupe Novembre continuent d’interroger l’image et se demandent ce qui se cache derrière elle ? Et de répondre à la question : « L’image ment, la photo nous trompe l’œil et nous nous illusionnons nous-mêmes. Le Groupe Novembre montre l’illusion comme le prestidigitateur dévoilerait ses trucs, pour en utiliser d’autres ».

Johannes Pfeiffer est à nouveau à Paris dans le XVIIIe. Il a réalisé une installation de fils blancs dans une friche de Montmartre, en tissant des fils qui se rejoignent sur le mur de l’écran d’un cinéma disparu.

Fidèle à son désir de promouvoir aussi des textes inédits d’auteurs absents des grands médias, TK-21 LaRevue ouvre ses portes à un nouveau venu avec un texte à l’humour décapant qui peut être évidemment reçu comme une carte de vœux libertine. William Radet, auteur et interprète de la partition littéraire et philosophique du FLOU reviendra bientôt avec de nouveaux textes relevant, eux, de sa veine habituelle.

Joël Roussiez, après la publication de Anecdotes et joyeux propos biographiques du pirate Farfali et comment il arriva, pour finir, qu’il débandit aux Éditions de L’arbre vengeur, revient avec deux très courts textes. Le premier commence ainsi : « Le jour se lève enfin, sous les rafales de pluie, la lumière s’adoucit et doucement s’éclaircit alors que le vent se calme un peu en remuant les feuilles de l’automne qui tombent et tournent loin au-dessus de la prairie, portées par les souffles intermittents qui passent ou s’enfuient… ».

Jean-Louis Poitevin clôt ce numéro avec la première partie d’un essai ancien un peu oublié autour de la question de la conscience historique. Ce livre propose une lecture des œuvres de Guy Debord. TK-21 LaRevue n’entend pas rester passive face au déferlement généralisé des fake news, des propos propagandistes que déversent les médias de la planète entière sur nos esprits fatigués de leur sauces rances, ni face aux commémorations qui vont émailler ce printemps français, qui on le sait déjà, ne sera en rien une fête de l’esprit et un moment de liberté, mais bien plutôt, au gré de la continuation d’une politique de mépris et de haine servie sur plateau de fer blanc par un autoritarisme en gants blancs, une période d’obscurcissement prolongé, celle que Hurlements en faveur de Sade de Guy Debord, à sa manière simple et radicale, celle de l’écran noir, annonça. Alors… ! À nous de jouer… !


Photo de couverture : Olivier Perrot
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De nombreux problèmes subsistent encore pour des utilisateurs de Safari. Le mal semblant être profondément ancré chez Apple, nous vous conseillons de lire TK-21 sur Firefox ou Opéra par exemple.