samedi 29 février 2020

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L’ineffable plasticité de la matière

, Marc-Williams Debono

Il s’agit d’une déambulation au travers de cinq pièces poétiques qui, chacune à leur mesure, nous font découvrir la plasticité sous-jacente de la matière, son ubiquité, sa primordialité sur ce qui suit et dont nous sommes le fruit.


Au préalable : un guide
sous forme de parcours

LA MATIÈRE RECÈLE,
LA PLASTICITÉ PORTE

 

Sculpté : métaphore ?
           … Donne vie à l’informé.

***

L’informé prend corps :
           C’est la plasticité de la nature.

***

La courbure espace-temps :
           Elle co-implique la matière et la forme.

***

Le plasme & le plaste :
           Chose formée vs chose formante.

***

 

PLASTIR REVIENT AINSI À SINGULARISER UNE FORME

JPEGUn univers sans bord ni centre,
un espace de pensée qui,
comme dans les tableaux d’escher,
se plastit au travers d’un cerveau
lui-même autoplasti

 

 

LE CONCEPT DE PLASTICITÉ

 

IL INTERROGE LA FORME ET LA GENÈSE DE LA FORME

 

JPEGC’est le fruit d’un échange réciproque : (ascendant — descendant, retroactif) au sein d’un même système (plasticité du vivant, morphogenèse, phylogenèse) ou de systèmes en interaction (espace-temps, sujet-objet, cerveau-esprit) entre
le donneur
et le preneur
de forme.

 

 

MATIÈRE dont la malléabilité est transcendée par L’ACTE PLASTIQUE

Il lui confère un statut dynamique unique a la source de la plasticité active du monde.

PLASTICITÉ comme :

  • Propriété fondamentale de la matière — ni purement systémique, ni émergente.
  • Capacité universelle de liage de couples fondamentaux (forme vs matière, neural vs mental, sujet vs objet…).
  • Action au point d’ancrage de dimensions ou d’expressions irréductibles.
  • Interface unique : qui a-t-il d’autre que la plasticité entre la matière et la forme ou entre l’expérience et la conscience ?

 

AU CŒUR DE LA MATIÈRE VIVANTE — NEURO-PLASTICITÉS

FORMÉ-INFORMÉ
MATIÈRE-FORME
PLASME-PLASTE      = COMPLEXES DE PLASTICITÉ

 

CERVEAU-CORPS-MONDE

 

PLASTICITÉS

PLASTICITÉ DU RÉEL = ENTRÉE EN MATIÈRE

      PLASTICITÉ DE L’ESPRIT

Une fois incarné, l’esprit est éminemment plastique car autant créateur que traversé par la forme

PLASTICITÉ DU SOI

PLASTICITÉ ACTIVE DU MONDE

 

MATIÈRE ET ANTIMATIÈRE

MATIÈRE NOIRE

 

 

 

 

 

 

MATIÈRE DÉBORDANT
LE CHAMP DE LA PENSÉE
POUR ABORDER L’ÉPISTÉMÉ

 

 

UN CONCEPT ÉPISTÉMIQUE DE PLASTICITÉ

- UN MONDE de CO-SIGNIFICATIONS :

  • A l’image de la plasticité cérébrale, il décrit à la fois une propriété de système et ses propres représentations.
  • A l’image de la biodiversité, il découvre une plante ancrée dans un corps, un milieu et un monde qui en se traversant se co-signifient.
  • A l’image des cosmogonies, il dévoile un lumen ou un espace de chevauchement qui s’arrogent le statut d’objet, d’être ou d’esprit.

LA FORME DÉVOILE LE FOND.
LE FOND S’INSCRIT DANS LA FORME.

- UNE RÉALITÉ : Il s’agit d’y voir un réel autoporté, une
dynamique bijective entre le monde réel et le monde perçu.

 

 

LA RÉALITÉ EST PLASTIQUE PAR ESSENCE
Une attitude / Transversale & Transdisciplinaire 

Défragmenter la connaissance
croiser les matières
inclure le sujet dans la
plasticité du monde

 

 

 

A PRÉSENT ENTRONS DANS L’ARÈNE POÉTIQUE : TOUR À TOUR SA PLASTIQUE, SES CÉSURES ET SES DÉBORDEMENTS…

 

 

 

Poème 1

CÉSURES & PLASTICITÉ

 

On voudrait nous faire croire
Que les césures n’existent pas.
Or, quelque magique
Que soit le règne du milieu,
Il n’en demeure pas moins le lieu
Singulier de deux moitiés
Dont l’une a été transmuée.

 

On voudrait nous faire croire
Que les césures n’existent pas,
Que toute ubiquité est vaine,
Alors que chacun n’est
Que scission d’un autre,
Appel contigu, émargée primaire.

 

On voudrait nous faire croire
En cet état transfuge,
Hors du champ de la pensée,
Or tout est plastique,
C’est dire ni ferme, ni césuré
Mais pris au saisir de la forme.

 

On voudrait nous faire croire
Que les césures n’existent pas,
Ni même les blancs ou les ajourés,
Alors que tout en ce monde
Est meuble, à la lisière du tiers,
Insoupçonné.

 

On voudrait nous faire croire.
Mais l’homme n’est qu’un sculpté,
Un champ inextricablement lié
De césures reines.

 

 

Poème 2

LE PHÉNIX DES INTERSTICES

Arc-bouter sa pensée à un monde tu.
En extraire labour après labour d’imperceptibles crêtes,
           Dorsales éparpillées.
Des mondes sans voix. Portés par leur vacuité.
Le silence est-il-je ? Insensé ? Infini ?
Se meut-il par fragments, idéogramme, expérience ? A-t-il une âme, un centre ou n’est-il qu’évaporation ?

Je le sens comme un troisième langage.
Celui du signe intemporel d’une présence au monde.
Celui d’un irrationnel érotique qui me pousse à chavirer.
Celui qui traverse l’immensité par énigmes,
Disparaît et resurgit là où on ne l’attend jamais.

Ce silence à une épaisseur, une texture. Je le bois satiné, tannique et infusé.
Il n’existe pas de mot pour le décrire.
On dira qu’elles ont bu au calice des Dieux,
Qu’Opuntia, Yucca, Hysope, Mélisse
Ou Agaves à Sisal sont autant de manifestations
                     De son identité.

Entrelacs et bourgeonnement.
Quand naît-il si ce n’est au carrefour délié
                     De mon ignorance ?
L’immensité succède à l’immensité.
Le fleuve second s’épand en tresses hyalines.
L’à-venir s’éploie sous mes yeux clos,
                      Le signe est là.

Arc-bouter sa pensée à un monde tu.
En extraire, monades après monades,
      Tous les sucs, tous les bruits.
           Du râle au cri déployé,
      Du spasme à l’écartèlement.

Mille arrimages pour un octroi.
Épigone, laquais ou Phénix des interstices,
La voie est au-delà.

 

 

Poème 3

À L’EMPORTE-PIÈCE

 

A l’emporte-pièce,
Un lacis dévoyé, un dessous d’onde
Une viole de gambe et deux ictères
Le devenir cahoteux du pli qui courbe,
De l’essaim devenu un.

 

Au dos,
La texture illicite d’un a-texte :
"Je est l’échine et toi la voûte
Nous inclinons vers soi"
Mais soi, est-ce nous ?

L’incompressible rumeur d’un réel attenant...

Soudain, un déhanchement
Dans la nuit peureuse, un, deux filets de jour
Des empreintes partout, un désir inassouvi
Je et l’amant avancent à petit pas,
Dérobent l’étoilée, son manteau hivernal,
Ses peaux et miasmes
Tout l’univers.
A l’emporte-pièce,
Un trait singeant la foule,
Mêlant opium et prose
Des douves feutrées,
L’espace d’un nerf qui arrache au temps,
Un descriptible qui tangue, saisit, s’énonce et chute…
Il n’y a plus rien, personne n’a dit
Je est qui sommes la voûte et l’assommoir,

Ce désert ébloui nous regarde.

 

 

Poème 4

RENOIR AU CHEVET

 

Un Renoir qui se consume
Entre les lignes
Des vasques mâtinées de sang d’encre,
En filigrane, au sommet des ombres,
           Une question :

Ne sommes-nous qu’en l’absence de l’un,
La présence de l’autre ?

Que battements de cils,
           Palpitements ?
Ne sommes-nous, cultivés par le pain,
Que ventres déracinés, illusions ?

En clair, engrenée dans la femme,
           Une réponse :

Au matin du monde, il y eut,
Papillonnants, deux cils en forme d’anse.
Anse du Graal, anse de pluie
Cillants dans la nuit.

Puis, ce fut à grands traits,
           A couteau tiré,
Que naquirent la rose et son écumoire.

 

 

Poème 5

LE SONGE

 

A même devenir, le présent passe.

Je songe à une nuque fléchie, arquée, sillonnant tout l’espace du champ. Une nuque parfaitement lisse, sans traces du message de l’origine. C’est ce stade (é)perdu. Ce stade diffus de chaque instant o- la clef tendue s’évanouit au fait du jour. C’est ici que le mythe de Sisyphe prend corps. Que tout ce qui naît du calcaire, mon avancée même, bute ou se soumet à une indolence soudaine.

Je songe à écrire une parole qui viendrait de cette évaporation. Une parole d’à-côté. De ce monde plastique où tout est haut, où tout se vit en vérité.

Livrer non plus l’ébauche du délit,
Mais, armés l’un contre l’autre,
La Vérité et le Délit.

Le songe ainsi apparut être divin, sans corollaires. Tout devait s’égoutter du fond de cette nappe. Tout était dans ce voir qui était à-côté‚ tout devait brûler dans sa travée. Des influences figuraient d’y vivre au lieu d’essaimer. Il rendait compte d’une pesanteur et de vagues torturantes, de stupeurs à la traîne des mots, de vaines percées en regard d’un rêve biaisé. Il arguait de marques opposées et d’entêtements, de déflagrations nourricières et en clair de transfigurations.

Le songe n’était pas de ces guides vacillants qui sèment à tort et à travers. Il était le lente ébauche d’une tendresse opérante. Il ‚tait surgissement. Des débordements d’hier, de ces lieux nappés de rose, demeurerait le secret. Ainsi danser toute une vie les poings serrés et craquer devant l’ange imaginé, en voir tout le dérisoire quand l’amour n’est pour, n’étaient à ses yeux que gestes de souffleur de mots. A ce point culminant où rien ne culmine, à dépasser le corps de toute rupture, à cette mise en demeure ultime, le songe veillait. L’égoïne, l’image rythmée de ces asphodèles tranchantes, Il - les avait dépassées.

Le songe m’est car il m’a préexisté. Il éveille des orbites, une géométrie, des racines de vie et, tapie, en transparence avec l’univers, une extraordinaire plasticité. Une dimension où s’imposera l’idée que l’esprit a une existence propre hormis nous, et qu’il enfante des mots à poétiser. Alors que je voulais embrasser la lumière, contentons nous du sceau : un vestige transposé. D’ici nous partîmes a l’assaut des culminants, de la chaleur des contresignes de l’intérieur, partageant chaque harmonique, la présence translucide du haut.

 

 

Poème 6

À L’AVERS DE

 

Et que cette éthique ne scelle à travers tous que ceux parmi les songeurs qui ont la réalité infuse, la sérénité des bas-matins, aux limbes ténébreux, qui sied aux Parques, aux faux-fuyants et aux vipereaux éteints. Je l’y vois auréolée de paresse aux creux sans lendemains. Momifiée sur un côté et terreuse de l’autre. Enhardie de l’errance, de la donne. Enfiévrée de visions de femmes cardinales et rotondes avec des ventres à n’en plus créer. Au désespoir continûment. A l’avers de. Régente en cette barque où je vis l’habitation. Où se distille dans notre fatras la ciselure tutrice. Mais tout autre est mon lien mon ‘songe vestigial’. Il argue d’une fauchaison seconde qui délivre la mère de son antre rond pour en faire une muse légendaire. Il titube dans l’arène évasive mais reconnaît les strates alluviales avant que de s’anuiter, la plèbe triviale de l’Athénée. Brasero de ces maigres lignes… Pour ces maigres lignes, courbes vitreuses où elle se dessine et m’embrase à son tour, me dévore l’humus et le lichen, la verve et l’horizon. Elle, ma saharienne, sera source déhiscente de mirages d’eau avec eau. Humeur lascive de pierres à l’abandon. Silhouette indécente d’une lunaison. Je te bois eau lustrale, à jamais. Ainsi nous nous marierons dans le sacre. Le volet salivera son blanc céruse à nos noces solaires, et chaque rayon dynaste criera dans sa langue nos bonheurs incessants.

Voir en ligne : http://www.plasticites-sciences-arts.org

Extraits poétiques issus des ouvrages de M-W Debono : La Joute, préfacé par Édouard Glissant, Éditions du Soleil Natal (1993) sauf le Poème 1 issu, comme certaines citations, de l’ouvrage Écriture et Plasticité de Pensée, Anima Viva Publishing House, préfacé par Michel Cazenave (2013).

Textes et illustrations © MARC-WILLIAMS DEBONO 2020

Concept de plasticité : tous les éléments abordés anarchiquement dans ce texte (lien matière-forme, complexes de plasticité, concept épistémique…) sont à lire dans une optique de déformation et d’entrée en matière. Ils sont largement développés par l’auteur sur le site de Plasticités Sciences Arts :
http://www.plasticites-sciences-arts.org