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In My Room/dans ma chambre
Claude-Maurice Gagnon
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Mes autoportraits ne sont pas exactement moi : je suis de plus en plus conscient qu’ils relèvent du processus de création comme un procédé qu’on ne contrôle pas tout-à-fait et qui, comme le regard, nous fait parler. Dans cette « parlure » se conjuguent ce que je connais de moi et ce qui se joue, au moment de la création, qui m’est inconnu, mais qui advient. Mes autoportraits m’informent, entre conscient et inconscient, de ce que je crois en être de mon regard.
Dans cette série de 2020, j’ai réalisé dix-sept autoportraits en noir et blanc avec un appareil numérique dans l’intimité de ma chambre avec une lumière faible.
Lors de la prise de vue j’ai procédé à la capture de mon visage en le cadrant serré avec le projet de privilégier le rapport au regard, lequel, dans le portrait, attire la plus grande attention du spectateur. Cela s’explique par la dimension expressive et humorale qui traduit la dimension affective du modèle à laquelle le spectateur cherche à accéder. Ne dit-on pas que « le regard est le miroir de l’âme ». Car le regard « parle » avec les yeux, il est langage, il attire ou repousse, séduit ou inquiète, mais, toujours il informe.
Dans ces autoportraits - qui métissent les genres du masculin et du féminin - le rapport à la ressemblance est évacué. Je me présente toujours comme l’Autre imaginaire de moi-même et du côté de la marge ou de la différence. De plus, ici, le visage s’affirme dans une absence de contexte : on n’y voit rien des objets de ma chambre. Mais, le fait de prendre mon portrait dans ce lieu privé me dispose à l’abandon de mes états d’âme. Sur les photos, le visage apparaît seulement contre un fond opaque (noir) ou encore il est dynamisé par des jeux d’ombres et de lumières aux formes ovoïdes qui l’envahissent en le surexposant ou en le noircissant.
À rebours, je remarque deux stratégies de regards dans mes autoportraits qui sont frontaux, en trois quart ou de profil : ils sont empreints de tristesse, d’inquiétude, de mélancolie ou ils sont traversés par une certaine absence ou froideur ce qui augmente leur étrangeté. Mais dans les deux cas, mes autoportraits sont signifiants. Et, dans ce sens, ils ne signifient jamais une manière de bonheur ou de bien-être.