All the world’s a stage

L’exposition All the world’s a stage nous réunit aujourd’hui sous une forme nouvelle et surprenante. Nous avons conçu des saynètes dans lesquelles les sculptures de Martin Mc Nulty, devenues des protagonistes anthropomorphiques, sont accueillies par l’espace mystérieux des peintures d’Alexandra Roussopoulos. De cette rencontre, un monde étrange, grave et léger, silencieux et intrigant, surgit. 

Alexandra Roussopoulos et Martin Mc Nulty

Saisis aux confins du jour et de la nuit, posés dans l’angle du ciel de la peinture d’Alexandra Roussopoulos, les objets ruisselants de lumière de Martin Mc Nulty semblent avoir traversé, en les solidifiant, les couleurs de l’éther pour venir se présenter sur la scène d’un petit théâtre en suspens. All the world’s a stage, and all the men and women merely players [1]. A travers ce voyage dans un temps sans rupture, la peintre et le sculpteur font naître des paysages célestes, baroques, doux et silencieux. Tout y est contrepoint et fait pour s’accorder – du plat d’un espace qui se plie à l’éclat du totem, du galet, de la pierre de lumière – dans une partition unique. Chaque scène recèle un mystère qui opère autour d’une vision, de la lente progression d’une aube mate dans un ciel originel jusqu’au scintillement des corps polis.

Verticales et suspendues au mur, les peintures d’Alexandra se prolongent en estrades pour recevoir les aérolithes de Martin qui s’y posent en confiance, cadrés par ces vues imprenables sur l’infini. Ou s’y appuient et les habitent avec tenue. Aux profondeurs immatérielles et aux dégradés subtils des aplats de la peinture répondent les sombres phosphorescences des paillettes, l’éclat de la nuit qui aurait pris des formes de bâtons primitifs, de résidus d’étoiles filantes et de gemmes étincelantes. Le spectacle est saisissant et pourtant, comme toujours, son élégance tient à son dispositif léger, mobile et modeste. Fidèles à soi-même, Alexandra Roussopoulos et Martin Mc Nulty rejouent sur la scène de l’art la partition perpétuelle de leur inaltérable connivence.

Marie-Fabienne Aymon