mardi 24 juin 2014

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A dialogue avec B

Thomas Zoritchak sur certaines de ses œuvres

, Thomas Zoritchak

La série A dialogue avec B est réalisée d’après des films, making of, ou séries existants. Le titre suggère le dialogue supposé entre un film et le spectateur, ce que lui retient ou ce qu’il voudrait éventuellement modifier d’un récit donné.

Titre générique du triptyque :
Arrêtez père, Attends, je veux écouter ça, Oui père.

Ce travail, commencé en 2008 et toujours en cours actuellement, consiste à isoler une image, la plupart du temps un insert, c’est-à-dire un plan très court servant à donner des informations complémentaires de ce qui se déroule dans la scène décrite. Le son et l’image restent synchrones. Le son est souvent gardé tel quel mais pour ce qui concerne l’image, je ne garde pas l’ensemble de la séquence. Celle-ci est donc visuellement incomplète, ce qui la transforme et lui donne un nouveau rythme.

Chaque vidéo est présentée en boucle de manière à ce que l’on oublie le récit et que l’on s’attache à regarder plusieurs fois de suite les faits sous un angle inédit. Temps suspendu, actions répétitives, cadence immuable. En parallèle, un travail de collecte peut être fait à partir des dialogues du film. Ceux-ci deviennent parfois les titres des vidéos, ou alors sont stockés ailleurs et réutilisés ultérieurement.

Dans le cas présent, - réalisé d’après My darling Clementine de John Ford (1946) - nous voyons le public, ricanant, ou riant grassement, à la limite hostile. Un jeu semble avoir été mis en place mais ne se déroule pas comme prévu. Le pianiste joue sa partition, l’acteur a des trous de mémoire, et un notable local crache ses poumons. Ce petit théâtre en noir et blanc est issu d’une séquence située au saloon. L’atmosphère est tendue, les personnages se jaugent, tout le monde participe au spectacle.

Le film de John Ford racontait à sa manière un conflit d’ordre culturel. Une famille d’escrocs sans foi ni loi sème la terreur dans une petite bourgade. Le shérif les combat et tente de faire régner l’ordre. L’autorité est défiée, elle doit se défendre. Face à elle, des individus pour qui seuls comptent leur accès au pouvoir et à la richesse.

Bien entendu, le récit n’apparaît pas clairement. Seules quelques bribes subsistent. Des sons, divers mouvements, un rythme. Certaines idées ou des questionnements propres à l’art surgissent aussi parfois en filigrane.

dialogues des trois films

Jeune homme, soyez prudent !

Tu peux rien nous dire / tu ne sais rien / d’autre que des poèmes ?

J’ai un très vaste répertoire, monsieur.

Formidable ! tant mieux / vas-y / lance toi !

Attendez, je veux écouter / je veux entendre / ça / ce qu’il déclame / ce qu’on lui réclame.

Stop / ça suffit / trop c’est trop !
Tu ne sais rien dire d’autre que des poèmes. Tu ne sais pas chanter, mais peut-être sais-tu danser…

Foutez-lui la paix / laissez-le ! Je vous en prie, continuez. Ne faites pas attention à eux… ces ignares.

Aidez-moi. Pouvez-vous continuer à ma place ? ça fait beaucoup trop longtemps… j’ai perdu l’entraînement / je m’essouffle vite.

On vous attends au théâtre. Je vous emmène.
- Merci monsieur. Shakespeare n’est pas fait pour les tavernes ni pour les rustres.
- Toi, tu restes ici.

Mes excuses, shérif, mes fils ont un peu bu.
Bien sûr, ils voulaient s’amuser.

Venez, je vous accompagne… au théâtre / sur la scène / devant votre public / devant ce public qui vous attends.

Stop !
Arrête !
Arrêtez père !
Si tu dégaines c’est pour tuer / Si tu sors ton arme c’est pour tuer.
Oui papa.

Je peux vous aider mademoiselle ? généralement / d’habitude / l’employé est là pour accueillir les arrivants…
Ce sont vos bagages ?
- Oui

Apportez-lui des seaux d’eau chaude pour qu’elle puisse prendre un bain…

- Oui shérif

Galerie Mamia Bretesché, 77, rue Notre Dame de Nazareth, 75003 Paris, du 21 juin au 12 juillet 2014.